Biométrie : souriez, vous êtes identifié

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Géométrie, trigonométrie, astrométrie… de toutes ces sciences qui finissent en « métrie » on en fait le tri… et pour cause, souvent abstraites et un peu pompeuses, on préfère passer son tour.

Et pourtant aujourd’hui j’ai envie de m’intéresser à la Biométrie.

Biométrie ? « bio » pour être vivant, « métrie » pour la mesure  (c’est d’ailleurs pour cela que notre unité de mesure s’appelle le mètre), on peut définir la biométrie dans ses grandes lignes comme l’étude quantitative de ce qui constitue l’être vivant.

Vous imaginez bien que les champs d’application sont multiples : agronomie, médecine, et j’en passe. Somme toute, il semblerait qu’en ce début de 21ème siècle l’étude quantitative des êtres vivants serve davantage à des fins de reconnaissance et d’identification de personnes en fonction de leurs caractéristiques biologiques : empreintes digitales, traits du visage, comportement, organes etc… En bref, tous caractères fondamentaux et permanents de l’individu qui le rendent unique.

En effet, le corps est le premier facteur d’ identité. D’ailleurs les empreintes digitales apparaissent dès la 13 ème semaine de gestation du fœtus donc souvent bien avant que les parents n’aient déjà réussi à s’entendre sur le prénom du futur arrivant.

Dans ce cas il conviendrait  d’apporter une définition un tant soit peu plus précise. Selon le CLUb de la Sécurité de l’Information Française « un système de contrôle biométrique est un système automatique de mesure basé sur la reconnaissance de caractéristiques propres à l’individu ».

Les techniques d’identification biométriques s’appliquent principalement dans les domaines de la sécurité (contrôle d’accès), militaire ou administratif.

Mais pour mieux appréhender le concept, voici un panel des techniques biométriques plus ou moins utilisées.

Biométrie, des classiques aux insolites



La rétine

Fiabilité : le top du top.

Caractéristiques : se base sur 92 points de repères.

Qui l’utilise ? Les hauts militaires et ceux qui travaillent dans le nucléaire. Cette technique, très onéreuse, est essentiellement utilisée pour des applications de haute sécurité.

L’iris

Fiabilité : aussi fiable que l’identification rétinienne, c’est dire !

Caractéristiques : situé dans l’humeur aqueuse et entouré par le blanc de l’œil, l’iris est constitué d’une texture d’environ 244 motifs uniques. Les éléments de l’iris mutent très peu durant toute une vie. La probabilité de similitude entre deux iris est de 1/10 puissance 72. Contrairement à la couleur de l’œil, le motif d’un iris n’est pas relié aux gènes, c’est à dire à l’ADN, ce qui rend la probabilité d’autant plus faible.

Qui l’utilise ? Spielberg (Minority Report) ou au contrôle des frontières.

La main

Fiabilité : très bonne.

Caractéristiques : reconnait la géométrie de la main en se basant sur une centaine de caractéristiques, allant de l’épaisseur des doigts aux dessins des lignes.

Qui l’utilise ? Les employés de Coca-cola et du musée du Louvre… entre autres.

Les veines

Fiabilité : bonne.

Caractéristiques : une technologie sans contact qui relève l’hémoglobine à l’aide d’un éclairage interne du doigt (modèle Hitachi) ou de la paume de la main (modèle Fujitsu).

Qui l’utilise ? Les japonais ! D’ailleurs au pays du soleil levant, 100 000 distributeurs ne crachent leur cash qu’à condition de montrer patte blanche.

Empreinte digitale


Fiabilité : moyenne.

Caractéristiques : c’est un dessin formé par les lignes de la peau des doigts, de la paume de mains, des orteils ou de la plante de pieds. Biologiquement les empreintes sont fiables puisqu’elles sont immuables et que la probabilité d’en trouver deux similaires est 1/10 puissance 24, autant dire quasi nulle.

Néanmoins, cette technique très répandue et peu onéreuse, n’est pas des plus fiables puisque beaucoup de systèmes de fraude existent à l’instar des faux doigts. En outre, il est possible de relever l’empreinte digitale de n’importe qui en apposant un bout de scotch sur le verre qu’il tient dans sa main.

Qui l’utilise ? Le gouvernement Français, pour nos passeports.

La démarche

Fiabilité : encore au stade expérimental au laboratoire de Southampton. L’identification de la démarche se heurte aux limites comportementales (comme les courbatures ou le stress) et vestimentaires (comme le baggy).

Caractéristiques : une technologie basée sur le captage par caméra des caractéristiques de la marche.

Qui l’utilise ? Les laborantins de Southampton… je présume.

L’odeur

Fiabilité : heu… on est perplexe.

Ce sont les universitaires  japonais qui ont lancé des projets de recherches sur la détection par l’odeur. Depuis rien de neuf sous le soleil.

Ces quelques exemples ne sont pas exhaustifs – il existe bien d’autres procédés d’identification biométrique – mais représentatifs du champs de possibilités qui s’offre à nous.

Et là, je me questionne : jusqu’où  la vulgarisation de cette science pourrait-elle nous amener ? Peut-elle devenir un levier marketing au point de transformer  nos habitudes de consommateur ? Doit-on alors se préparer à la mort imminente des mots de passe et jeux de clés traditionnels d’ici quelques années ?

Décryptage.

Plus qu’une science, un vrai business

international biometric group

Au-delà de l’aspect scientifique, l’identification biométrique, avec 20% de croissance par an, est un marché extrêmement porteur. Si en 2009 le CA global était de 5 milliards, 10 milliards d’euros sont attendus d’ici 5 ans selon l’excellent magazine Usbek & Rica.

Il faut dire que les états des pays sont de très gros clients.

En avril 2010, le fichage biométrique des étrangers (impulser par la problématique des « roms ») est rentré en vigueur sur notre sol français. Depuis, tout étranger bénéficiant du retour aidé dans son pays doit laisser un petit souvenir de son passage avec ses empreintes digitales. Cette application vise, selon le ministère de l’immigration, à lutter contre les fraudes. Il faut dire que les frontières constituent un terrain de choix pour déployer les nouveaux systèmes de triage « scientifiques ».

En juin dernier, le Sénat a quant à lui adopté une loi visant à créer une nouvelle carte d’identité électronique biométrique. Ladite carte devrait intégrer deux puces. La première contiendrait les informations de son propriétaire à savoir état civil, adresse civile, taille et couleurs des yeux, empreintes digitales et photographie. La seconde, facultative, permettra au titulaire de s’identifier sur Internet. L’objectif de cette loi, selon ses créateurs, n’est autre que de combattre l’usurpation d’identité dont environ 200 000 français sont victimes chaque année.

Si cette loi fait débat en France, certains pays à l’inverse se battent pour bénéficier de l’identification biométrique. Au Gabon par exemple, l’opposition cherche à imposer le fichage biométrique de tous les habitants, seul gage, à leurs yeux, d’un processus électoral enfin fiable.

En Inde, se sont quelques 2,2 milliards d’iris et de mains qui sont en train d’être répertoriés par l’état. Une grande avancée pour un pays dont les habitants ne détenaient jusqu’alors pas la moindre carte d’identité.

Attention n’allez pas croire que les secteurs publics sont les seuls à utiliser l’ identification biométrique. S’ils constituaient 64,7% des commandes en 2007, le secteur privé arrive au grand galop, si bien que d’ici 2015 les commandes  privées devraient atteindre les 52%, selon le rapport « the future of biométric ».

Marketing biométrique

Les entreprises investissent dans l’identification biométrique souvent pour des questions de sécurité. Pourtant il semblerait que le marché soit en proie à un nouveau levier marketing depuis début avril 2010. En effet la CNIL a autorisé la banque Accord, filiale d’Auchan, à recourir à un dispositif de paiement biométrique dans les hyper-marchés du groupe. Un projet bien nommé le « paiement d’un geste » (P1G).

Comment ça fonctionne ? Vous faites vos courses, vous passez en caisse, vous pressez votre doigt sur un capteur et vous partez, la somme étant déjà prélevée de votre compte le temps que vous passiez les portes du magasin.

Attention le capteur biométrique ne fonctionne pas avec les empreintes digitales – trop peu sûr comme système – mais avec le système veineux qui se trouve sous le doigt, vous savez, la méthode dont les japonais sont très friands.

Pour pouvoir bénéficier de ce nouveau moyen de paiement il faut être titulaire d’une carte VISA. Ensuite il suffit de se rendre dans une agence Accord, enregistrer le gabarit du réseau veineux de deux doigts et le tour est joué !

Une innovation de taille pour les banques quand on sait que la fraude à la CB leur coûte très cher. De plus, il paraitrait que les plus de 40 ans y soient très favorables, ce système évitant la mémorisation du code…  un peu tiré par les cheveux comme argument à mon goût.

A l’inverse, je connais un tas de détracteurs qui présenteraient un tout autre doigt pour accueillir cette innovation. Cependant, qu’elle soit « bonne » ou « mauvaise », elle témoigne d’une nouvelle ère marketing. Voilà qui est particulièrement intéressant. La technique veineuse elle-même n’a rien d’inédit, mais la généralisation de l’usage biométrique, dans les actes les plus quotidiens comme le paiement à la caisse, marque sans aucun doute la banalisation pour tous d’un nouveau système.

Après le secteur  public, le secteur privé c’est au secteur de la grande consommation de s’y mettre ; que l’on dise bienvenue au marketing biométrique !

Biométrie à l’usage des particuliers : gadget ou opportunité ?

On pourra choisir son nom, et les terminaux de reconnaissance permettront de retirer de l’argent, prendre l’avion, se marier etc. Cela recouvrera tous les besoins de la société.

Christophe Naudin, chriminologue

Comme nous l’avons vu plus haut, la « Bio » constitue un vrai levier dans l’univers du B to B. Mais qu’en est-il du B to C ? La baisse conséquente des prix des techniques biométriques d’identification rendent cette science exploitable pour répondre à des problématiques grand public. En effet, comme le stipule l’enseignant chercheur Christophe Rosenberg (école nationale supérieure d’ingénieurs de Caen) « Un capteur d’empreinte digitale ne coûte que quelques euros ». Ainsi l’identité biométrique, au-delà de son potentiel sécuritaire, pourrait nous apporter un nouveau confort de vie.

Pas très étonnant alors que surgissent de nouvelles offres pour particuliers. Je me rappelle encore, il y a quelques mois de ça, d’un proche à moi, qui venait d’acheter un ASUS rog, G73. Fier de sa nouvelle acquisition il fanfaronne : « regarde Camille ce petit bijoux technologique… je peux même débloquer ma session grâce à la reconnaissance faciale ! ». Innovation dans l’idée mais dans le fait un processus dont je remets en doute la fiabilité puisque qu’il ne reconnaissait pas son utilisateur « non mais c’est une question de luminosité de la pièce tu comprends». Oui très certainement. Quoiqu’il en coûte nous avons fini par déverrouiller la session avec le traditionnel mot de passe. Honte à nous c’est tellement 20 ème siècle.

Que l’on ne m’accuse pas de « storyteller ». Non seulement cette histoire est vraie, mais surtout, elle illustre assez bien ma réflexion suivante : la biométrie, tendance « gadget » ou prémisse d’une révolution ?


Le site Voice Pay propose aux internautes de se servir de leur voix pour sécuriser leurs achats. Pour ce faire, le consommateur doit compléter une fiche d’inscription dans laquelle il rentre quelques mots clés parlés afin de créer une empreinte vocale biométrique unique. Par la suite, lorsqu’un achat est effectué, l’utilisateur vérifie la transaction téléphonique ou virtuelle par système vocal. Une réelle innovation sachant qu’aucun logiciel supplémentaire n’est nécessaire. Il suffit de s’inscrire sur le site et de lier son compte Voice Pay à une carte Visa ou MasterCard physique ou virtuelle.

Une clé USB d’apparence toute simple. Pourtant trône  une petite tige grise à droite, c’est un lecteur d’empreinte digitale que l’utilisateur doit presser pour déverrouiller les informations présentes. Un gadget que chacun d’entre nous peut acquérir sur le site de la Fnac pour une vingtaine d’euros !

L’application recognize me , disponible sur l’Appstore, permet à tout détenteur de l’Iphone 4 de déverrouiller son appareil via la reconnaissance faciale. Un procédé rendu possible grâce à la caméra placée sur le devant du téléphone. Don’t worry, au cas où l’application ne fonctionnerait pas très bien, le créateur à prévu un système de mot de passe traditionnel, histoire de ne pas rester coincé.

Au-delà de toutes ces offres gadget & co, la biométrie trouve sa place dans la domotique. Aujourd’hui maintes entreprises, à l’instar de Tryba, proposent aux particuliers d’ouvrir leur porte grâce à leurs empreintes.

Ce système d’accès avec lecture d’empreinte, totalement intégré à la porte, allie selon le communiqué de presse de la marque « technologie, design et confort de vie ». C’est amusant de constater que  le coté confort est davantage mis en avant que l’aspect sécuritaire. Cela dit si vous avez bien lu l’article vous comprendrez aisément qu’empreinte digitale ne rime pas forcément avec sécurité…

Biométrie sauce  B to C, sera ou ne sera pas ?

Si le recours à la biométrie est de plus en plus présent dans le B to B, il semblerait que les offres C to C soient davantage des gadgets qu’une réelle révolution des usages. Mais rien à faire, la biométrie reste l’un des plus gros fantasmes de tout bon geek trendsetter, sociologue ou féru de prospective qui se respecte !

Le prénom et le nom, aujourd’hui, ça ne fonctionne plus, à cause du développement de la mondialisation démographique et culturelle. Alors on doit aller vers un nouveau concept d’identité, qui soit universel et qui s’appuie  sur la technologie que l’on maîtrise. En panachant les techniques (empreintes digitales, ADN, morpho de la main et du visage…) on protège l’identité de chacun.

Christophe Naudin

Seul fait certain, nous ne sommes qu’au début de l’histoire que la biométrie est en train d’écrire.

Xavier Baillet

Entrepreneur et Directeur de la Création d'entreprises dans les secteurs du design, du marketing et du digital depuis 1999.

J'aime faire avancer les gens, les idées et la société. J'aime les entreprises utiles et les entrepreneurs passionnés.

J'aime faire exister les idées et les projets qui ont un sens pour les gens.

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